En pratique vétérinaire, il n’est rare de découvrir que certaines personnes « s’amusent » ou s’entrainent au tir sur les animaux – domestiques ou non.
Pris pour cibles, nous les voyons en consultation, si ils ont la chance d’avoir survécu. On note le plus fréquemment une plaie ponctiforme, avec un point d’entrée, et parfois de sortie … Les dégâts dépendent des organes touchés, et bien sûr du calibre et de la puissance de l’arme à feu.
Il est clair que les animaux ne survivent pas face à une arme puissante, pistolet, revolver, fusil 22 long-rife, fusil de chasse. Personnellement, j’ai déjà entendu des chasseurs se vanter « d’assainir » nos campagnes de ces » nombreux » chats … « envahissants et nuisibles »… Je vous avoue que j’ai réagi verbalement et pas très cordialement ! On se demande quel espèce est la plus nuisible sur cette planète, je vous laisse trouver la réponse.
Les chats – car ce sont souvent eux qui en sont le plus souvent victimes – ( nous ne parlerons pas des pauvres pigeons … on parle bien de tir au pigeon … ) sont souvent pris pour cibles par de simples citadins, voir des adolescents, avec des pistolets ou carabines à air comprimé. Ce sont les plombs que l’on retrouve le plus souvent en ville. A la campagne, ce sont des plombs de chevrotine, l’essentiel de la cartouche est alors passé à côté : notre chat « chanceux » a été plus rapide – que notre chasseur … mais ce n’est hélas pas toujours le cas.
Parmi les cas les plus graves, quand les animaux sont restés vivants, on rencontre des Fractures osseuses par arme à feu. L’ os a stoppé le projectile, mais les dégâts sont importants et gravissimes. L’ os est pulvérisé en petits morceaux. Des techniques chirurgicales complexes sont nécessaires pour soigner l’animal, mais parfois, la seule alternative de guérison est l’amputation du membre atteint.
S’il vous plaît, Messieurs ( mesdames ? ), « passionnés » d’arme à feu et de tir : N’utilisez vos engins de mort que sur des cibles fixes dédiées à cela. Epargnez les êtres vivants, quels qu’ils soient.
Voici le cas récent qui m’a motivé à vous écrire cet article :
Jeune épagneul breton – chien de Chasseur par excellence – ramené d’Espagne, abandonné dans un refuge – par un chasseur, vraisemblablement. Il boitait d’un membre postérieur. L’examen clinique montre une atrophie importante des muscles de la cuisse, un signe du tiroir sur le grasset, pathognomonique d’une Rupture complète des ligaments Croisés antérieurs .. ? Sur un chien de moins de 2 ans ? Un traumatisme sévère a dû se produire ?
Radiograhies : Surprise !
On voit facilement le Plomb de Carabine à Air Comprimé en forme de diabolo. Il est incorporé dans l’os ! dans une cavité, au niveau de l’extrémité distale du fémur de ce chien. » L’ accident » a dû se produire chez le chiot : le plomb n’avait pas trop de puissance – heureusement – ( tir de loin ou carabine ancienne détériorée ), – L’os – tout jeune, devait être encore Tendre et malléable, il ne s’est pas fracturé comme un os adulte – Le plomb s’est juste écrasé et a pénétré dans le fût fémoral, à l’arrière du genou. Il a sectionné l’insertion des ligaments croisés, en évitant l’artère, la veine fémoral et les nerfs principaux qui ne passent pas loin. Dans son malheur, notre pauvre chiot a eu de la chance. Avec la croissance, le plomb s’est retrouvé incrusté dans l’os qui a grandi autour. Evidemment, le premier « propriétaire » ne s’est aperçu de rien ? en tout cas, il n’a pas consulté de vétérinaire ( c’était bien un chasseur ! ). Le chien a guéri de ses plaies sans complication, mais il a continué à boiter … Devenant inutile et encombrant – pour un chasseur, il a été abandonné.
Heureusement, la chance tourne. Un brave jeune couple, habitant dans le quartier de la Montagne Verte, est allé passer des vacances d’été en Andalousie. Ils sont – par hasard – entrés dans un refuge, et ont adopté ce joli petit épagneul breton. Mais il boitait, alors ils ont consulté à leur retour à Strasbourg. Et surprise, quand nous avons fait le diagnostic !
Nous avons opéré ce chien : le plomb a été extrait chirurgicalement, et le genou a été stabilisé par une technique extra-capsulaire de stabilisation de la RLCA. ( Cf Article correspondant ).
Le chien a déjà bien récupéré, quelques mois après l’opération, et il fait le bonheur de ses nouveaux propriétaires – bienfaiteurs – qui le méritent amplement – bien plus que les précédents.
Ah, la nature humaine ….
Dr Martin DUBOIS DMV – Médecine et Chirurgie des Animaux de compagnie – Strasbourg